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Apparitions

Photographies de voyage/2005-2012

J'ai entendu un homme à la radio dire que ce qu'il aimait beaucoup dans le documentaire, c'est la recherche poétique qui consiste à regarder les choses de peu et à découvrir une sorte de résonance merveilleuse, mystérieuse derrière ces choses de peu.
L'homme de la radio a dit que les films de Van der Keuken étaient bourrés de ce moments de « fulguration », et j'ai cru qu'il s'était trompé de mot, qu'il voulait dire « fulgurance ». Et j'ai appris qu'une fulguration, c'est un éclair sans tonnerre.
Jusqu'ici, les petits éclairs sans tonnerre, je les appelais des « apparitions ». Beautés fragiles qui échappent si l'oeil n'est pas à l'écoute.
Avec la photo, je veux aussi faire tinter les choses de peu.
Je veux que ces photos essaient d'être des attentions portées à « ce qui affleure sous la vie quotidienne qui tâchent de repérer le point où elle est universelle ».*
Je veux m'occuper un peu, patiemment, du ténu.
Je veux faire attention aux événements faibles, je veux être frappée par l'image d'un manège dans la lumière du matin, je veux regarder la silhouette de quelqu'un qui ne fait rien et en être absolument saisie.
Je veux trouver les endroits où la réalité se soulève juste quelques centimètres au-dessus du sol.

* J'emprunte des mots à Georges-Arthur Goldschmidt à propos de Peter Handke