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Vies possibles et imaginaires

Rozenn Quéré, Yasmine Eid-Sabbagh
Projet produit par le Festival Images (Vevey)
LIVRE :
2012 / 16,5 x 23,5 cm / 162 pages
Éditeur : Photosynthèses / Festival Images
Conception graphique : Till Gathmann
Langues : français, anglais, arabe
INSTALLATION :
100 photographies / formats originaux / livret de texte / bandes son

SCÈNE 1
Aujourd’hui. Intérieur jour, véranda, Seine-et-Marne, France. Une dame joue au solitaire. On entend clic, clic, clic, puis sa voix qui chuchote «5,4, 3, 2...» C’est Frieda.
Une très vieille femme aux cheveux blancs l’observe. C’est auntie Else.

FRIEDA
Personne dans la famille ne se doutait de ça. Mon frère, mes sœurs, ils ne se doutaient pas que je n’existais pas. Moi non plus, je ne m’en doutais pas. Quand je suis venue en France, à trente-trois ans, je l’ai appris. Impossible d’avoir mon acte de naissance. Je n’avais été inscrite nulle part. Pourquoi ? Parce que quand je suis née, le bombardement avait commencé sur Jérusalem. Tout le monde avait peur. Les religieuses disaient à maman : «Dépêche- toi!» Papa lui disait : «Dépêche-toi. Les jumelles nous attendent à la maison, Stella et Grazie.» Et elle a fait sortir le bébé. Alors, les religieuses ont dit en italien si c’était une fille ou un garçon, et maman a dit : «Que ce soit un singe, mais que je finisse! C’est mon sixième.» Alors, je suis sortie, ils m’ont emballée, et les religieuses sont parties au sous-sol, et papa et maman sont rentrés à la maison.

* * *

C’est l’histoire de 4 femmes fortes et truculentes, exilées aux 4 coins du monde, 4 sœurs Palestino-Libanaises qui ont traversé l’histoire du 20ème siècle. C’est une histoire, entre documentaire et fiction, entre biographie et théâtre, qui s’appuie sur des photographies de famille, des entretiens sonores, sur le récit d’événements vécus et d’autres fantasmés.
C’est une réflexion sur une manière de récolter, de fouiner, d’écouter, de faire émerger des histoires et des mots, et de les recréer au présent, de la façon la plus vivante possible, en mêlant la subjectivité de ces femmes à la nôtre. Ce que nous proposons là, c’est une relecture de la réalité teintée de tendresse et d’humour, une enquête au cœur de laquelle nous plaçons l’imagination des unes et des autres.
Jocelyne, l’aînée des sœurs, vivait au Caire. Frieda, la benjamine, s’est exilée à Paris. Stella a quitté le Liban en guerre pour New York, et Graziella, sa jumelle, est la seule à être restée à Beyrouth.
Pour raconter cette histoire, nous avons parfois créé l'image de souvenirs inventés, et avons même, d’autres fois, consenti à être suspectées d'avoir inventé du souvenir - c'est-à-dire : manipulé des photographies- là où il y avait simplement défaut de mémoire.
Loin du portrait objectif ou historique de Graziella et ses sœurs, avec « Vies possibles et imaginaires » nous nous sommes attachées à traduire l’extravagance et l’imagination de ces femmes, à donner à leurs affabulations le même statut qu'au réel. En d’autres termes, à travers l’articulation de photographie d’archive et de texte, nous n’avons pas cherché à écrire leur histoire. Nous avons voulu écrire leur mythe.

Installation "Vies possibles et imaginaires" :
Festival Images, Vevey (Suisse). Septembre 2012.
Festival Chobi Mela, Dakka (Bangladesh). Janvier 2013.
Rencontres d'Arles (France). Juillet 2013.
Beirut Art Center (Liban). Novembre 2013-Janvier 2014.
Stimultania (Strasbourg, France). Avril-juin 2014.
Rencontres photo de Gaspésie (Canada). Juillet-septembre 2014.
Galerie 247 (Paris, France). Mars-avril 2015.
Contemporary Image Collective (Le Caire, Égypte). Novembre 2016.

Presse
Real and imagined memories of four sisters from Palestine, d'Olivia Snaije
True lies, de Kevin Jones
La photographie au prisme du souvenir, de Stéphanie Jacquet
Vies possibles et imaginaires, de Yasmine Youssi

Extrait sonore

"Vies Possibles et Imaginaires" a reçu le Grand Prix international de photographie de Vevey en 2011 et le Prix Découverte des Rencontres d'Arles en 2013.

Avec le soutien de Wallonie-Bruxelles International.